¿Emplacement réservé?

Série de photographies, 20 x 30 cm chacune, 2016-2018.

Avec une bourse octroyée par le gouvernement du Mexique à travers le Secrétariat des Relations Extérieures et l’AMEXCID, pour les Images réalisées à Mexico en novembre et décembre 2015.

A Mexico, dans les rues vouées au commerce du centre historique et du quartier de la Merced, une pratique se répète avec une grande fréquence. Des objets ou des constructions minimales se trouvent déposés au bord du trottoir de façon à empêcher le stationnement des voitures. Ces dépôts sur la voie sont si nombreux et si variés que j’ai pu les photographier sous le mode de la collecte ou du catalogue. Interpelée par leur aspect de sculpture improvisée et urbaine, faites d’objets ou de matériaux sans valeur, j’ai supposé que c’étaient les commerçants ou les artisans qui s’approprient de cette façon une partie de l'espace public pour que l’entrée de leur magasin ou de leur atelier reste visible et accessible. Mais cette pratique n’est pas seulement le fait du voisinage, elle est surtout celui d’une organisation globale connue sous le nom de sa main-d’œuvre, les "viene viene". De cette manière officieuse, bien que complètement assimilée dans la culture de la ville, des emplacements sont réservés pour contrôler et monnayer le stationnement des voitures. Par ailleurs et en conséquence, les habitants des quartiers plus résidentiels se livrent à la même chose, pour garder leur place de parking devant chez eux, mais aussi, comme les commerçants et artisans, pour empêcher les "viene viene" d’occuper la place. Cette série, motivée au départ par la forme plastique d’un usage de l’espace public et sa pratique par ses citoyens, s’est précisée en intégrant cette autre dimension, délictueuse et stratégique, à priori mystérieuse pour un étranger. Elle témoigne finalement d’une forme de lutte codifiée pour un territoire et de la multiplicité de ses signes. Le titre associe des mots français et la ponctuation interrogative espagnole.